Hubert-Félix Thiéfaine Hubert-Félix Thiéfaine

De l'amour, de l'art, ou du cochon ?

Ecoute-moi... écoute moi mon amour... je claquerai connement latête coincée dans un strapontin...Ce sera pendant l'été de 1515 sur l'aéroport de Marignane... Jeclaquerai vraiment connement...Mais je ressusciterai le troisième jour et ce troisième jour seral'avant veille de l'attentat de Sarajevo...Je passerai te chercher et tu me reconnaîtras facilementpuisque j'aurai mon éternel chapeau à cran d'arrêtEt que je porterai à la boutonnière une fleur de tournesol commecelle que tu aimes tant !...Toi ! tu te jetteras dans mes bras et alors je te dirai- Souviens-toi ! Souviens-toi, mon amour : J'étais beau comme unpassage àniveau et toi tu étais douceDouce comme les roubignolles d'un nouveau-né... souviens-toi...On avait des scolopendres qui dansaient dans nos veines etUn alligator au fond de la cuisine sur la droite en entrant...Mais si !...Quand on entrait par la bouche d'incendie, dans ta bouche, il yavait des sirènesQui chuchotaient des mots... des mots qu'on avait oubliéd'inventer... des mots qu'on avait oublié d'inventerÀ cause de notre enfance malheureuse... de notre enfancemalheureuse parce qu'on avait mal aux dents...On avait mal aux dents parce que toujours on nous obligeait àmanger des sucres d'orge et qu'on n'aimait pas ça !Et puis après... Après, quand on se sera bien souvenu... Quand,fatigués de s'être souvenu...Nos souvenirs ne seront plus que des loques... Alors... Je teprendrai par la taille etNous irons nous promener à l'ombre des tilleuls menthe... Tu mesouriras... Je te rendrai ton sourire etDès lors... Dès lors nous ne saurons plus vraiment si ce que nousressentons l'un pour l'autreC'est de l'amour... De l'art... Ou du cochon !